dimanche 17 mai 2015

CATA DU PAPY BOOM: Rien de prévu par nos gourous !

Quelquefois on ne peut plus maintenir à domicile une personne très âgée et si un problème de handicap (accidentel) vous empêche de la prendre chez vous, vous vivez une double galère:
Faire comprendre à la personne qu'il vous est impossible de l'accueillir, et d'autre part trouver une solution !
Le temps vous est compté car vous ne disposez que de la durée de convalescence (ou de rééducation dans un établissement spécialisé ) où les patients sont à peu près bien encadrés.
La psychologie du parent âgé évolue progressivement vers l'attitude d'un enfant de plus en plus jeune avec égocentrisme en progression constante, retour de gourmandise, mauvaise foi, caprices, exigences appuyées par un jeu de comédie etc... Tout convergeant vers la satisfaction de ses désirs au point de faire une abstraction totale de l'indépendance des autres (généralement les enfants qui l'hébergent).
En voulant créer une bonne ambiance pour les anciens on en arrive très vite à une vie d'esclave qui peut mettre votre couple en péril car il ne vous reste plus le moindre temps de vie à deux ( votre santé tant physique que mentale peut aussi en prendre un coup) . Comme un enfant en effet, la personne âgée n'a plus la moindre notion des efforts qu'elle vous demande, quelquefois elle s'en moque, et elle positionne la barre de plus en plus haut, sorte de test permanent pour voir à quel moment vous direz «Stop» !
Face à votre mère vous êtes désarmé(e) car vous culpabilisez à l'idée de dire «non» et l'escalade commence. D'un autre côté vous savez parfaitement que vous ne tiendrez pas longtemps à ce régime et il faut songer au placement même si cela vous déchire le coeur !
Précisément une intervention chirurgicale peut être l'occasion, car elle signifie hospitalisation puis rééducation donc abandon du domicile ou de votre propre logement pour une durée significative.
Malgré une inaptitude certaine votre parente va commencer par vous dire «ça va aller. je vais revenir chez toi, tu m'aideras, mais pas question de maison de retraite». Au bout d'un moment, malgré des efforts, malgré le déambulateur, la dépendance devient évidente et vous pouvez alors souffler à votre mère qu'elle serait bien en famille d'accueil. Mais quand l'idée a fait son chemin la galère administrative commence, d'autant qu'il faut quitter le centre de rééducation et passer en accueil temporaire en maison de retraite ( 3 mois par année civile au maximum dans le Finistère), en attendant la solution miracle !
Ma femme et moi avons eu la chance de trouver rapidement cet accueil, en plus dans une maison à bonne réputation ! On se dit alors que l'on aura le temps de trouver «la» bonne famille d'accueil, pas trop loin de chez soi, et qu'à défaut, si la maison de retraite convient , on peut aussi prévoir une inscription sur la liste d'attente.

La France est un drôle de pays car les structures d'accueil manquent cruellement, et celles qui existent sont prises d'assaut puisque les enfants du Baby boom sont maintenant en retraite! Evidemment le réflexe est de s'inscrire partout pour avoir une place mais pour donner une idée de la pression, une maison de retraite neuve de 86 lits ( près de chez nous) a une liste d'attente de 200 personnes ! Comme une place ne se libère qu'au décès d'un des pensionnaires vous imaginez le temps nécessaire pour faire ne serait-ce qu'une rotation complète !
Résultat la détresse de nombreuses familles totalement désemparées ne pouvant ni accueillir la personne faute d'équipements médicaux ou même d'agencements appropriés, ni même se libérer en temps ( pas question de quitter le travail, si on en a un, car alors on ne peut plus manger soi même). Et à moins d'une capacité financière importante on ne peut pas payer une personne d'assistance de nuit en plus d'aides ménagères en journée !

Mais même pour l'accueil temporaire, où la rotation est relativement rapide ( règle des 3 mois de séjour ), il y a de la demande, et quand l'opportunité se présente on la saisit aussitôt !
Mais voilà que dès le premier jour les choses se gâtent ! Pour la sécurité de la personne âgée, tout comme pour son confort, une seule idée vous obsède: la sortir de là au plus vite, tant les conditions sont exécrables !

Les lieux d'abord:
Si le Hall d'accueil est vaste, éclairé par de grandes baies vitrées, avec des couloirs de distribution larges (presque 3 mètres) vers la Salle de restaurant et d'animation, vers les locaux techniques et quelques chambres, le tout avec de la peinture blanche..... Désillusion avec les étages, aux couloirs étroits, peints en gris anthracite, presque noir ! Certes on ne sort de ces établissements que pour aller au cimetière, mais quand même, ce n'est pas une raison de rappeler en permanence aux pensionnaires que leur heure est proche, par ce décor lugubre!
Quant à la chambre: une fenêtre minuscule, des murs totalement passés dont on ne sait s'ils sont gris clair dégradé ou blanc ayant jauni vers un beige sale avec le temps.... Le coin toilette est muni d'un minuscule lavabo; taille lave mains, sans la moindre tablette ni le moindre rebord pour poser ,savon dentifrice, verre à dents et autres objets !!!
Seule concession à la modernité une prise antenne télé près de la porte d'entrée avec une prise secteur pour le récepteur, et l'interrupteur de commande du plafonnier à côté. Rien d'autre, même pas la moindre prise pour une lampe de chevet, en revanche il y a la fameuse sonnette pour appeler le personnel !
On se pose des questions sur les choix du concepteur de cet établissement construit au milieu des années 90, ce n'est pas si vieux quand même !
Ce sont des personnes plus ou moins valides qui viennent là ! S'il leur prend l'envie de lire le soir il faut sonner pour demander de la lumière, puis sonner de nouveau pour la faire éteindre, car pas question que la personne âgée se lève pour éteindre elle même puisqu'alors elle se trouverait dans le noir avec son déambulateur (risque énorme de chute). Pas question de brancher une rallonge sur la prise du récepteur télé pour un chevet , car le fil en travers de la pièce deviendrait un véritable piège accrochant les pieds aléatoirement, avec une fois encore un risque de chute. Alors il faut sonner!

Cela me conduit à décrire les conditions d'accueil
Mais hélas, le personnel en sous-effectif réagit très lentement ou oublie qu'une demi-heure avant vous avez sonné ! Cela l'énerve d'être dérangé car tout est prévu pour un travail minimum. La personne qui sonne se fait enguirlander puis à la longue finit par céder et ne dérange plus.
Même pour les médicaments, les posologies ne sont pas respectées et que vous ayez des étalements prévus ou pas par votre médecin, les infirmières ou aide-soignantes vous donnent tout en une seule fois quand cela les arrange. Inutile de leur en faire la remarque la réponse est invariable «ici c'est comme ça». Inévitablement cela perturbe l'organisme de prendre une dose massive ou lieu d'étaler ou bien de devoir prendre ensemble des médicaments prescrits en prise séparée parce qu'ils sont plus ou moins incompatibles en prise simultanée. Les plaintes des patients n'étant pas entendues, comme en plus il n'y a aucun médecin sur place, on n'est pas à l'abri d'accidents.
Pour les petites anomalies physiques le déroulement des faits est identique et certains symptômes négligés peuvent se traduire par des tragédies. Ce laxisme que je qualifie d'irresponsabilité ( les infirmières sont quand même formées un minimum pour voir les anomalies) est inadmissible en un tel lieu !
D'autant plus inadmissible que chacun de ces établissements accueille grosso modo un tiers de pensionnaires victimes de la maladie d'Alzheimer qui sont incapables de formuler d'éventuels problèmes les concernant . Le personnel compétent ne faisant pas son travail de transmission aux médecins on peut craindre le pire !

J'extrapole sans doute mais je suis persuadé que les dysfonctionnements viennent précisément du mélange des personnes saines d'esprit et des autres. Le personnel de l'établissement gère les personnes Alzheimer de façon autoritaire car il n'y a pas d'autre moyen, surtout à un stade avancé de la maladie. Cet autoritarisme a, selon moi, peu à peu fait tache d'huile pour devenir la norme vis à vis des pensionnaires sains d'esprit, surtout avec l'évolution de ces derniers vers un comportement d'enfant.
Le souci premier du personnel est donc devenu la simplification de son propre travail, quitte à brimer et brider les pensionnaires par de plus en plus d'autorité et de contraintes, alors qu'en théorie et sur la charte de chaque établissement le bien-être et le confort des résidents sont décrits comme l'objectif principal !
Les visiteurs qui sont toujours bien accueillis croient leurs parents bien traités alors qu'en fait c'est l'inverse, et les intéressés se taisent pour éviter des brimades ou mauvais traitements ou engueulades à répétition !

Je comprends parfaitement que travailler une journée complète aux petits soins des personnes difficiles, capricieuses, qui sonnent à tout bout de champ peut être mentalement stressant quand en plus il faut les déplacer en fauteuil à chaque repas en commun, pour la lecture du journal, pour le goûter, le repas du soir, passer en plus pour les soins ou la toilette, voire l'habillage, et le changement des couches aux incontinenets.
C'est un métier très prenant et très difficile à vivre . Mais alors, que les recruteurs sélectionnent des candidats très calmes et patients, et non des gens version «soupe au lait» qui sont très rapidement agressifs ou violents en paroles !

Un exemple de simplification du travail:
incontinent ou pas vous ne pouvez pas vous opposer à la pose d'une couche. Ma belle-mère qui n'est pas incontinente préfère qu'on l'aide à se déplacer aux toilettes car elle ne veut pas se soulager dans sa couche, or elle se fait réprimander quand elle sonne pour qu'on lui approche le déambulateur du lit et qu'on la rassure par une présence ( après x chutes et les deux fémurs réparés, elle a une peur irrépressible de tomber de nouveau, cette appréhension ne pourra disparaître qu'avec de la patience et beaucoup d'exercice) «On n'est pas là pour ça, vous n'avez qu'à uriner dans votre couche !».

Conclusion:
au lieu d'aider les personnes à reprendre confiance en elles, et à devenir de plus en plus autonomes (ce qui dans ce cas soulagerait le personnel qui interviendrait moins), on met en place des protocoles qui créent ou augmentent la dépendance chez ceux qui pourraient se débrouiller seuls !

Les parents s'ingénient à apprendre aux jeunes enfants à gérer leurs envies et à faire leurs besoins de façon indépendante, l'apprentissage étant parfois long ! Brusquement à l'âge de la retraite on les oblige à faire l'inverse, à ne plus se retenir, et tout cela pour simplifier le travail du personnel. Il y a de quoi être déstabilisé ! Et justement à un âge avancé on a besoin de repères solides auxquels se raccrocher, surtout après le départ du domicile de toute une vie, et la perte du contact des voisins et des proches !

Après les lieux et les conditions d'accueil, l'ambiance:
Malheureusement, ce rassemblement est davantage un moins qu'un plus !
Bien que préférant lire elle-même son, journal, ma belle-mère a accepté qu'on conduise son fauteuil en salle d'activité pour la lecture du journal. Cette première expérience fut aussi la dernière. On y retrouve en effet tous ceux qui ne peuvent s'opposer à ce déplacement, ils n'écoutent rien, dorment la tête en arrière, la bouche ouverte, ou restent vautrés sur le fauteuil, d'autres sont penchés de côté, le regard fixe, personne ne parle ni ne répond aux questions de la lectrice sur un éventuel souhait de lecture d'article ou de sujet traité ..... Tous subissent !
C'est totalement déprimant !
Lors des repas, on vous laisse dans votre fauteuil roulant même si vous pouvez vous déplacer... Au lieu de précisément faire faire un peu d'exercice avec déambulateur ce qui serait précieux pour les opérés. D'autant qu'avec l'ascenseur aidant on ne se déplace que sur du plat ! Et puis on est quand même mieux pour déjeuner, assis sur une chaise que dans un fauteuil roulant ! Encore une action qui empêche les personnes de récupérer de l'autonomie et les rend de plus en plus dépendantes!
Si je vous dis qu'une partie des pensionnaires ne pouvant s'alimenter seuls on les nourrit au biberon, que d'autres, ne mangent rien, tandis que certains se goinfrent, mangeant même avec les mains, n'adressant la parole à personne, et que les rares qui parlent ne le font que du fait de leur ancienneté dans les lieux et restent entre eux, et surtout ne parlent pas aux nouveaux !
Tout cela est de nature à donner le cafard !
En guise d'apothéose, après le déjeuner on reconduit les pensionnaires à leur chambre mais on les laisse dans le couloir, comme pour un simulacre de sortie en extérieur: Ils se font face dans le couloir, la plupart assoupis, dans la même attitude que le matin lors de la lecture du journal. C'est si déprimant de les voir ( et je ne vous parle pas des odeurs ) que ma belle mère préfère rester dans sa chambre au lieu de faire un peu de marche avec son déambulateur car de surcroît l'étroitesse du couloir rend difficile la progression en déambulateur entre les fauteuils.
Elle finit par sortir au moment du goûter auquel elle ne participe pas, ne buvant pas de café ni ne mangeant de gâteaux ( du moins si près du repas de midi).

Pour le cas personnel de ma belle-mère qui prend le matin du thé vert, elle a demandé qu'on lui serve de l'eau chaude seulement, en proposant d'utiliser ses propres sachets de thé vert. Refus du personnel, «c'est comme ça!» lui dit-on, «vous prenez ce qu'on vous donne».
Dans la semaine elle a voulu mettre un pull vieux rose pour changer de son pull bleu marine. Refus du personnel qui a décrété que son pull marine n'était pas sale et qu'elle n'avait qu'à le garder. Ma belle mère étant de petite taille ne pouvait pas se saisir elle même de ce pull se trouvant sur la plus haute étagère de son armoire, donc hors de portée pour elle.
Elle a demandé un shampooing et la personne de service lui a dit oui je vais venir... Mais n'est jamais venue? Du coup c'est ma femme qui lui a fait un shampooing (en moins de 5 minutes car elle a des cheveux courts).

S'ils s'agit de coïncidences elles sont fâcheuses mais il y en a beaucoup! Pas le droit aux petits plaisirs quotidiens, pas de thé vert, pas le droit de changer de pull, pas de médicaments selon la posologie prescrite ( parfois suppression arbitraire d'un médicament... Par un non médecin !), personne pour vous faire un shampooing quand la tête vous gratte ou que les cheveux deviennent gras, engueulade quand vous demandez de lire un peu le soir ou alors on vient vous éteindre la lumière à 22 h quand vous sonnez à 21h. Le déambulateur posé volontairement loin du lit pour vous empêcher d'aller aux toilettes et vous obliger à uriner dans votre couche (très inconfortable de rester ainsi «humide» toute la nuit !)
J'ai du mal à comprendre comment l'établissement peut prétendre respecter la charte rédigée par ses soins et dont le but est avant tout le bien être et l'intérêt des pensionnaires !

A cela s'ajoute l'incohérence bien française dans la gestion.
Tout est planifié encore une fois pour simplifier le travail et limiter les frais... Qu'on vous dit !
Alors on nettoie les couloirs avec force javel, on met au sale le linge de nuit chaque matin. On demande aux pensionnaires d'avoir 12 gants de toilette car ils sont mis au sale chaque jour (sauf le week end ?) ..
Vous ne me ferez jamais croire que des personnes valides faisant leur toilette changent de gant tous les jours pour juste se débarbouiller le visage et le buste ! Bien rincé après chaque usage, le gant peut être réutilisé au moins deux à trois fois. Je veux bien admettre que le deuxième gant utilisé pour la toilette du bas , surtout avec une personne incontinente, on le change quotidiennement. Mais les deux gants c'est une idiotie; même chose pour la serviette d'essuyage. Celle du haut peut bien faire deux ou trois jours !
Entre le linge de nuit et les gants et serviettes une gestion rigoureuse permettrait d'économiser beaucoup sur le poste blanchisserie :
Et le gaspillage de couches! On pourrait tout de même considérer que les personnes non incontinentes n'ont pas besoin de couches, cela ferait un économie significative en couches et en heures de travail pour les poser!
Tout cela cumulé fait beaucoup d'argent sur une année et je considère que c'est actuellement du gaspillage !
Parallèlement à cela on laisse les gens toute la journée avec leurs couches souillées (la plupart) d'où les odeurs évoquées plus haut dans le texte !
Nettoyer le sol et le linge oui, mais ce serait mieux de laver les gens non ?
Et on peut légitimement se demander s'il ne serait pas plus sain et plus humain de faire prendre une douche par semaine à tout ce monde là (ou même deux par semaine) au lieu d'une tous les 15 jours !
Car les économies d'heures sur la pose de couches aux personnes qui n'en ont pas besoin et les économies en blanchisserie permettraient sans doute d'employer une personne de plus en améliorant les conditions de travail de tout le personnel et dans la ligne de l'objectif de bien-être et d'intérêt des retraités.

C'est la crise et on se fout de créer des emplois, on préfère gaspiller de l'argent pour des tâches inutiles, on se fout encore plus des retraités et de leur état. Ce qui compte c'est que le travail décrété par un sombre technocrate soit exécuté !

La solution de la famille d »'accueil est bien plus conviviale pour les retraités ayant leur tête, mais c'est une structure trop petite car cette famille se trouve quasiment esclave de ses pensionnaires sans répit. L'idéal serait une structure plus grande (jusqu'à 16 lits ) gérée par deux familles d'accueil qui pourraient au moins souffler, prendre des vacances grâce à l'appui de la deuxième équipe de travail. Une telle structure est bien moins coûteuse en investissement par lit qu'une maison de retraite classique, mais également bien plus efficace en terme de confort des pensionnaires, et surtout d'un coût de fonctionnement inférieur de 30 à 40% à ce que l'on connait aujourd'hui dans les Ehpad..
Il y a là un gisement considérable d'emplois et d'économies budgétaires, et à l'époque du papy boom nos politiques ne prévoient rien ( comme d'hab ! ).
Cela dit il est évident que les maisons actuelles serviront uniquement aux malades d'Alzheimer, mais avec encore plus de personnel pour éviter le désastreux régime actuel, du moins tant que les mesures d'éradication seront refusées par le lobby pharmaceutique (avec exécution par les pantins politiques qui se soumettent)..

Ne nous leurrons pas, nous passerons quasiment tous par là, alors autant prendre les devants et inciter à des créations privées puisque nos dirigeant n'excellent que dans la nullité des choix et de la gestion !