vendredi 13 décembre 2019

RETRAITES : UN FAUX PROBLEME !

Conseil ajouté en bas d'article le 15 Décembre 2019 (caractères en rouge). 
 
En rédigeant les deux articles précédents je ne savais pas ce que vraiment la réforme pouvait être dans le détail. Seules les déclarations diverses de la presse, des syndicalistes, des politiques servaient de repères. J'avoue quand même que je n'ai pas vraiment fait des recherches sur internet pour approfondir ! Mais le discours du premier ministre, s'il a précisé certaines choses, n'a pas été suffisant et en fait c'est en tombant par hasard sur Antoine Bozio dans une émission que j'ai réellement su de quoi il retournait.
Antoine Bozio a co-écrit avec Thomas Piketty le livre «Pour un nouveau système de retraite» et ce sont les deux auteurs qui précisément ont, dans le but de promouvoir ce système nouveau, informé les membres du gouvernement et un tas de dirigeants concernés (syndicalistes inclus) au cours de réunions tenues il y a déjà pas mal de temps.
Il est évident que les choses auraient pu être claires dès le départ si tout avait été expliqué aux français en transparence... Mais non!

Analyser ce qui se passe dans le détail, poser en série la question POURQUOI ? Permet de comprendre que cette réforme des Retraites est un faux problème.
Pourquoi en effet avons nous des régimes spéciaux? Deux raisons:
1/ une première, normale, venant des pouvoirs publics qui accordaient des avantages en raison des circonstances économiques constatées ou exceptionnelles, ou encore de nécessité impérieuse.
2/ une deuxième, anormale. Se sentant forts et soutenus par les syndicats, les bénéficiaires ont pu par moments peser et faire plier les pouvoirs publics qui ont ainsi acheté la paix sociale en faisant payer à la collectivité les avantages (pas toujours justifiés) accordés à un groupe minoritaire.

Pourquoi ces comportements et ces choix ?
Plutôt que d'augmenter les traitements et salaires il était plus facile d'accorder des avantages sur la retraite et des avantages sociaux. Economie budgétaire immédiate et conséquences sur la retraite très lointaines donc pour un autre gouvernement que celui en place. Mais également souci de redresser la situations de professions en difficulté pour leur permettre d'augmenter leur retraite, notoirement inférieure (même avec les nouveaux avantages) à celle des autres catégories.
Pour les intéressés, prise en otage du public, chantage au blocage du pays pour faire plier le gouvernement et obtenir des avantages supérieurs à ceux dont bénéficiaient les travailleurs du Privé. Pour les élus il suffit de voter une loi à leur profit... Une constante depuis l'instauration de la République, mais une anomalie puisque théoriquement c'est au peuple de décider. Le fait de dire le peuple c'est nous est quand même abusif lorsqu'il s'agit de voter pour soi des privilèges.

Pourquoi pas d'autres solutions?
Pour la résolution d'un problème il est toujours plus facile de désigner un bouc émissaire (le symptôme) que de traiter les causes. Et les politiques ont l'art de refiler les problèmes aux gouvernants ultérieurs, tout en promettant à chaque élection qu'ils vont résoudre la question mais que l'opposition les en avait empêchés pendant le mandat écoulé. D'où la demande d'une majorité forte pour agir vite..... Depuis des décennies les dirigeants ont ainsi parlé du problème des retraites..... Mais jamais agi (ni pour cela ni pour autre chose, en fait!)
Pour les syndicats et fonctionnaires il est plus facile de se battre pour un groupe précis que pour l'intérêt général du pays (ce n'est d'ailleurs pas leur but). Le rapport de force permet au groupe de gagner ce que les individus seuls n'ont aucune chance d'obtenir. Pour que le deal soit acceptable on le labellise secteur public et les dirigeants politiques échappent ainsi à une modification législative dans le privé. D'autre part le fameux argument des avantages acquis, provoque des mobilisations dès que pointe l'idée de supprimer les avantages indus (pour cause de disparitions des raisons de l'octroi initial). Il résulte alors une accumulation de privilèges au point que même l'opinion publique accepte l'idée de supprimer les régimes spéciaux.

Que se passe-t-il donc?
Le gouvernement, par la bouche d'Edouard Philippe, pense compenser par des mesures spécifiques, les inégalités de carrière (disparité homme-femme par exemple), la pénibilité de certains métiers par rapport aux autres, les retraites dérisoires de certaines professions.... Il reconnaît ainsi que certains régimes aboutiraient sans ces avantages à des retraites notoirement insuffisantes.... Et nous touchons alors le fond du problème: si des français ont dans un régime unique, des retraites inférieures à celles des autres catégories c'est tout simplement parce que leur activité est , pour diverses raisons économiques et autres, sous rémunérée. La solution pour faire accepter le régime universel est donc de modifier les conditions économiques pour que chacun puisse être normalement rémunéré et avoir une retraite décente.
J'ai abordé ce sujet dans l'article précédent traitant du cas des agriculteurs, en évoquant des solutions. Mais le problème se pose aussi pour les enseignants, notoirement moins payés que ceux des autres pays européens, surtout les enseignants du primaire (c'est sur eux que repose la responsabilité d'apprendre à lire écrire et compter aux enfants, ce travail bien fait conditionnant la réussite scolaire dans le secondaire et le supérieur).

Prévoir de nouvelles dispositions spécifiques dans telle ou telle profession, après avoir supprimé tous les régimes spéciaux, revient pour le gouvernement à recréer de nouveaux régimes spéciaux. Apparemment les énarques sont fâchés avec la logique.... Mais en même temps ils ne veulent pas s'attaquer aux raisons économiques des sous-rémunérations qui risqueraient de soulever des questions qui fâchent, et de nécessiter des actions au niveau de la planète (en raison des imbrications économiques de tous les pays)... Tout cela est sinon impossible du moins proscrit, et la lâcheté politique fait le reste..... Il est bien plus facile de traiter des symptômes en affirmant que c'est la solution et de laisser, sans le dire, le traitement des causes réelles aux futurs gouvernants, c'est à dire de renvoyer ce travail... Aux Calendes grecques.

Le régime spécial des agriculteurs avait tenté, sans y parvenir, d'améliorer la retraite agricole en garantissant systématiquement à tous une retraite à taux plein (la cotisation minimale valide 4 trimestres chaque année), peine perdue puisque la cause est la rémunération réelle dérisoire. Quant aux enseignants, le fait de calculer la retraite sur les 6 derniers mois de salaire évitait de revaloriser les traitements de tous les profs pour que le régime normal leur garantisse la même retraite. Les dirigeants ont bien fui leurs responsabilités et trouvé une mesure de rafistolage.
On peut s'attendre à des dérapages, car revaloriser les profs de 20% dès 2022 va générer des réclamations des autres fonctionnaires voulant également bénéficier de la même revalorisation.... Bonjour les déficits si tous ces gens voient leur rémunération bondir de 20% et bonjour la hausse des impôts pour financer cela  !!

Je tiens le gouvernement et les syndicats (et manifestants) responsables solidairement du désastreux avenir du pays, l'un parce qu'il ne traite pas les causes, les autres parce qu'ils ne protègent que les intérêts de la minorité qu'ils représentent, et tous ces acteurs pour leur mépris de l'intérêt du pays.

Retour à la case départ et à la nécessité d'un financement extérieur qu'aucun gouvernement ne veut mettre en place tant qu'il en est encore temps. Et ça, c'est une chose qui m'exaspère !

QUITTE A MANIFESTER, FAITES LE UTILEMENT:  DEMANDEZ DES MESURES AUGMENTANT LES REVENUS CAR SI LES REVENUS AUGMENTENT LA RETRAITE SUIVRA QUEL QUE SOIT LE MODE DE CALCUL

P.S.
La suppression du paramètre durée du travail, avec le remplacement du nombre de trimestres cotisés et celui du revenu global, par l'unique critère des points, oblige le gouvernement à fixer un âge de départ arbitraire.  Cela pose des problèmes pour les gens à carrière longue qui vont travailler bien trop, mais il est impossible de fixer un nombre de points pour partir, puisque ce nombre est fonction du revenu et pas de la durée de travail. Je pense qu'il faudrait conserver le total cumulé des périodes de travail afin de déterminer soit une durée minimale requise avant le départ en retraite, soit l'âge légal.

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