Une pétition circule
pour protester contre les salaires abusifs de certains patrons. Il y
est réclamé l'application de la promesse de Hollande de rester dans
le rapport de salaire de 1 à 20 entre le moins payé et le plus payé
de l'entreprise. J'emploie à dessein le terme mieux payé car le
patron n'est pas nécessairement le mieux payé: il n'est pas rare
que certains employés gagnent plus que lui !
L'esemple des footballers
est facile: Ibrahimovic gagne58,5 millions d »'Euros par an
(dont 20 millions de salaire) alors que son patron Laurent Blanc ,
gagne 6 Millions. Face à ces chiffres je dirais que le PDG de
Peugeot est un «petit joueur»!
Un styliste renommé sur
qui repose le succès commercial d'une collection, donc la survie de
l'entreprise peut gagner beaucoup plus que le patron, même remarque
pour un «nez» dans la parfumerie de luxe etc...
Ce serait socialement
préférable que la grille des salaires dans une entreprise
corresponde au rapport de 1 à 20, ou même moins, pourquoi pas !
Mais malheureusement, ni l'argument de la promesse électorale, ni
l'analyse proposée dans la pétition ne peuvent servir de point
d'appui pour une action dans ce sens, car la réalité du terrain
n'est pas prise en compte.
Les politiques ne sont
que des parleurs, par conséquent ils évitent au maximum d'agir et
leurs promesses n'engagent que «ceux qui les écoutent» .Alors
quand le candidat d'un grand parti de gouvernement ose promettre une
chose pareille c'est que le niveau de nos élites est tombé bien
bas, plus bas encore que leur niveau dans les sondages.
Ce qui est grave c'est
que ces propos sont repris par une partie de la population qui à
force de les répéter finit par y croire ! Nous sommes
théoriquement dans un pays de liberté et en principe une
démocratie, il résulte qu'en contexte libéral l'Etat ne peut pas
se substituer aux personnes physiques ou morales et faire de
l'ingérence dans leur vie privée (de citoyen et d'entreprise) à
moins d' en assumer financièrement les conséquences.
Exemple chiffré:
Je prends l'exemple d'un
patron gagnant 5,4 millions par an, soit un peu plus que le PDG de
Peugeot ( 5,2 Millions en fait) ceci pour faciliter les calculs. En
face le salarié de base est au SMIC de 1500 Euros par mois ou 18000
par an.
Donnée de base 5,4
millions c'est 300 fois le SMIC de 18000 Euros.
Pour obtenir l'échelle
de 1 à 20 on peut, soit faire monter le salaire de base à 1/20 de
5,4 millions c'est à dire à 270000 Euros par an pour chaque
ouvrier, soit plafonner le plus haut salaire à 360000 Euros par an (
20 fois les 18000 Euros de base).
Dans les deux cas c'est
impossible. Chaque ouvrier étant payé 270000 Euros par an vous
imaginez facilement le prix des voitures ( la 108 la moins chère
serait affichée au moins à 45000 Euros). En deux mois la marque
fait faillite ! L'Etat devrait faire face a un pays entier de
chômeurs mais n'aurait plus de recettes fiscales ( sauf pendant un
mois ou deux) donc devrait recourir à des emprunts internationaux
(augmentant la dette) pour pouvoir payer tout ce monde, les
industriels délocaliseraient et très vite le pays serait
insolvable !
Dans le deuxième cas
plus personne ne voudrait diriger une grande entreprise à ce niveau
de salaire. Les entreprises à l'abandon risqueraient le rachat et, à
défaut, les concurrents s'en donneraient à coeur joie pour faire
disparaître ces entités affaiblies et non réactives. Il est en
effet évident que si le plus gros salaire était limité les
salaires des cadres supérieurs seraient aussi en baisse et que nos
élites techniques et commerciales fuiraient par partir sous d'autres
cieux!
Ce n'est donc pas
réaliste, ce qui ne veut pas dire qu'il ne faut rien faire !
La pétition ignore
également une donnée fondamentale du terrain que je vous livre sous
forme d'un exemple:
Un commerçant ayant
ouvert son magasin en nom personnel démarre lentement et gagne moins
que le SMIC la première année. Mais son activité augmente peu à
peu et il finit par gagner 10 fois le SMIC au bout de 3 ans . Il
ouvre alors un second magasin puis un troisième et finit par créer,
toujours en nom personnel, une petite chaîne qui s'étend
géographiquement: en 10 ans il a atteint 100 fois le SMIC. Mais,
d'un coup, la mode change et l'activité porteuse ralentit
sensiblement, le chiffre plonge, il doit céder ses plus mauvais
points de vente et licencier du personnel. Que s'est-il passé ?
Les employés,
exemplaires, ont fait leur métier le mieux du monde, ce n'est donc
pas leur travail excellent qui a permis au patron de gagner 100 fois
le SMIC. Aucun lien n'existe entre la qualité du travail et le
revenu du patron. La réalité est plus terre-à-terre: Le patron
gagne beaucoup d'argent si, et seulement si, il vend à beaucoup de
clients. Le facteur prix est déterminant, même si d'autres
éléments interviennent, comme la psychologie ( image de la marque
dans l'esprit de l'acheteur), la composition (ingrédients ou matière
utilisée: plastique, ou métal, ou etc...),les qualités physiques
de l'objet , l'esthétique, les fonctions annexes, les qualités
ergonomiques et le confort etc...
De très bons ouvriers
peuvent fabriquer un objet mal conçu, qui ne se vendra pas pour
cette raison et que les clients bouderont . Parallèlement de très
bons vendeurs ne vendront que très difficilement un produit qui ne
plait pas !
Si un commerçant finit
par crever le plafond de 20 fois le SMIC, comment justifier le fait
de bloquer son bénéfice personnel en raison d'un rapport de 1 à 20
? Et qui hériterait de l'argent? Car les employés sont déjà
intéressés. Un Etat qui bloquerait ainsi le bénéfice d'un
commerçant friserait le totalitarisme !
Si le commerçant est en
société, alors oui ,il peut bloquer son salaire dans une échelle
de 1 à 20, mais c'est alors une hypocrisie car il touchera quand
même les dividendes de sa société ce qui ne changera rien au
montant gagné !
J'ai volontairement pris
cet exemple d'un commerçant car même dans un groupe de production
comme un constructeur automobile, la bonne marche dépend des clients
et de leurs achats, le travail des ouvriers n'est pas la condition
essentielle de la réussite. Ce qui compte c'est de vendre, On le
constate avec par exemple Airbus, ou les chantiers navals de Saint
Nazaire, on vend d'abord et on fabrique après. Les ouvriers ont beau
être considérés comme parmi les meilleurs de la planète, dans les
moments creux, les chantiers navals ont frôlé la disparition faute
de clients !
Un dirigeant comme le PDG
de Peugeot a toujours une partie de sa rémunération indexée sur
les résultats, il ne perçoit pas qu'un salaire au sens strict du
terme. Dans ce contexte il est bon de rappeler que le groupe Peugeot
a vendu en 2015 2973000 véhicules dans le monde. Si le PDG était
payé à 2 Euros par véhicule vendu il gagnerait 5,94 millions
d'Euros, or il en gagne 5,2 millions!
Il faut remettre les
choses dans leur contexte et dire que Peugeot qui a augmenté ses
ventes de 1,2% en 2015 a réalisé 1,2 milliards d'Euros de bénéfice
Net. Si vous divisez ce bénéfice net par le nombre de véhicules
vous trouvez 4036 Euros de net par véhicule, pas mal non ?
Peugeot a décidé de
donner une prime de 2000 Euros à chaque salarié, un bon
encouragement quand même ! Rappel il y a 184107 salariés dans le
groupe Peugeot (Monde) à 2000 Euros cela fait la coquette somme de
368,3 millions d'Euros. Sans cette prime, le bénéfice Net
dépasserait 1,5 Milliards.
Le revenu du PDG est
dérisoire face au bénéfice du groupe. Baisser ce revenu n'aurait
pas d'impact sur l'entreprise sauf de faire partir les cadres et
faire plaisir à quelques personnes avant le crash de l'entreprise.
Sauf grosse erreur de ma
part, ce qui intéresse les salariés c'est de garantir leur emploi
avant tout et de voir augmenter leur rémunération dans le temps si
cela est possible. Dans ces conditions il faut chercher des clients
et garantir que ces clients vont continuer à acheter la marque.
La solution me paraît
évidente, reste à savoir si les syndicats vont pousser ce pion,
et là j'en doute:4036 Euros par véhicule ce n'est pas rien et, pour
la protection de l'emploi, la prudence voudrait que le prix public
des modèles soit baissé en moyenne de 2000 Euros par véhicule en
favorisant les petites et moyennes gammes. Inévitablement la
clientèle affluerait et la marge plus faible serait compensée par
des ventes en hausse (et globalement le bénéfice augmenterait ).
Je vous donne l'exemple
de la 108 affichée12850 Euros. La prendriez-vous à 10500 Euros ?
Et celui de la 308 GT à
31150 Euros, vous laisseriez-vous tenter à 29850 Euros ?
Mais les syndicats
préfèrent se battre sur des acquis, protéger leurs droits de
façon rigide, au risque de tout perdre en mettant l'entreprise en
difficulté par leurs grèves, surtout en période difficile...
La
protection de l'emploi par une pression sur la direction dans le but
de faire baisser les prix n'est pas dans leur ADN, mais ce sont
pourtant bien les clients qui les font vivre ! Sans clients il n'y a
ni ouvriers, ni patrons ! Vous y croyez vous à des syndicats qui
feraient grève pour réclamer une baisse du prix des voitures ? Ce
serait pourtant terriblement efficace, ils auraient l'opinion pour
eux, donc en plus un fort soutien.
Mais
j'oubliais, c'est vrai nous sommes en France !
Cela dit
si toutes les entreprises françaises agissaient ainsi (jetez un coup
d'oeil sur le cumul de tous les bénéfices des entreprises cotées
en Bourse ), les prix chuteraient de façon significative ( avec ne
serait-ce que 200 milliards utilisés pour les baisses de prix, sur
les 400 Milliards estimés de bénéfices), un énorme coup de fouet
pour la croissance, d'abord à l'exportation puis dans le pays grâce
à un bond significatif du pouvoir d'achat de chaque citoyen.
Mais les
acteurs économiques qui ont le sens de l'intérêt général ne sont
pas légion et comme les élus ne poussent pas dans la bonne
direction..... Il ne se passe rien/
I HAD A
DREAM ! Pourtant on n'a jamais été si près de le réaliser sur
le plan des possibilités, et en même temps si loin sur le plan des
mentalités ….. !
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