vendredi 6 mai 2016

PROMESSES... ET TRAVAIL : I HAD A DREAM !

Une pétition circule pour protester contre les salaires abusifs de certains patrons. Il y est réclamé l'application de la promesse de Hollande de rester dans le rapport de salaire de 1 à 20 entre le moins payé et le plus payé de l'entreprise. J'emploie à dessein le terme mieux payé car le patron n'est pas nécessairement le mieux payé: il n'est pas rare que certains employés gagnent plus que lui !
L'esemple des footballers est facile: Ibrahimovic gagne58,5 millions d »'Euros par an (dont 20 millions de salaire) alors que son patron Laurent Blanc , gagne 6 Millions. Face à ces chiffres je dirais que le PDG de Peugeot est un «petit joueur»!
Un styliste renommé sur qui repose le succès commercial d'une collection, donc la survie de l'entreprise peut gagner beaucoup plus que le patron, même remarque pour un «nez» dans la parfumerie de luxe etc...

Ce serait socialement préférable que la grille des salaires dans une entreprise corresponde au rapport de 1 à 20, ou même moins, pourquoi pas ! Mais malheureusement, ni l'argument de la promesse électorale, ni l'analyse proposée dans la pétition ne peuvent servir de point d'appui pour une action dans ce sens, car la réalité du terrain n'est pas prise en compte.

Les politiques ne sont que des parleurs, par conséquent ils évitent au maximum d'agir et leurs promesses n'engagent que «ceux qui les écoutent» .Alors quand le candidat d'un grand parti de gouvernement ose promettre une chose pareille c'est que le niveau de nos élites est tombé bien bas, plus bas encore que leur niveau dans les sondages.
Ce qui est grave c'est que ces propos sont repris par une partie de la population qui à force de les répéter finit par y croire ! Nous sommes théoriquement dans un pays de liberté et en principe une démocratie, il résulte qu'en contexte libéral l'Etat ne peut pas se substituer aux personnes physiques ou morales et faire de l'ingérence dans leur vie privée (de citoyen et d'entreprise) à moins d' en assumer financièrement les conséquences.
Exemple chiffré:
Je prends l'exemple d'un patron gagnant 5,4 millions par an, soit un peu plus que le PDG de Peugeot ( 5,2 Millions en fait) ceci pour faciliter les calculs. En face le salarié de base est au SMIC de 1500 Euros par mois ou 18000 par an.
Donnée de base 5,4 millions c'est 300 fois le SMIC de 18000 Euros.
Pour obtenir l'échelle de 1 à 20 on peut, soit faire monter le salaire de base à 1/20 de 5,4 millions c'est à dire à 270000 Euros par an pour chaque ouvrier, soit plafonner le plus haut salaire à 360000 Euros par an ( 20 fois les 18000 Euros de base).
Dans les deux cas c'est impossible. Chaque ouvrier étant payé 270000 Euros par an vous imaginez facilement le prix des voitures ( la 108 la moins chère serait affichée au moins à 45000 Euros). En deux mois la marque fait faillite ! L'Etat devrait faire face a un pays entier de chômeurs mais n'aurait plus de recettes fiscales ( sauf pendant un mois ou deux) donc devrait recourir à des emprunts internationaux (augmentant la dette) pour pouvoir payer tout ce monde, les industriels délocaliseraient et très vite le pays serait insolvable !
Dans le deuxième cas plus personne ne voudrait diriger une grande entreprise à ce niveau de salaire. Les entreprises à l'abandon risqueraient le rachat et, à défaut, les concurrents s'en donneraient à coeur joie pour faire disparaître ces entités affaiblies et non réactives. Il est en effet évident que si le plus gros salaire était limité les salaires des cadres supérieurs seraient aussi en baisse et que nos élites techniques et commerciales fuiraient par partir sous d'autres cieux!
Ce n'est donc pas réaliste, ce qui ne veut pas dire qu'il ne faut rien faire !

La pétition ignore également une donnée fondamentale du terrain que je vous livre sous forme d'un exemple:
Un commerçant ayant ouvert son magasin en nom personnel démarre lentement et gagne moins que le SMIC la première année. Mais son activité augmente peu à peu et il finit par gagner 10 fois le SMIC au bout de 3 ans . Il ouvre alors un second magasin puis un troisième et finit par créer, toujours en nom personnel, une petite chaîne qui s'étend géographiquement: en 10 ans il a atteint 100 fois le SMIC. Mais, d'un coup, la mode change et l'activité porteuse ralentit sensiblement, le chiffre plonge, il doit céder ses plus mauvais points de vente et licencier du personnel. Que s'est-il passé ?
Les employés, exemplaires, ont fait leur métier le mieux du monde, ce n'est donc pas leur travail excellent qui a permis au patron de gagner 100 fois le SMIC. Aucun lien n'existe entre la qualité du travail et le revenu du patron. La réalité est plus terre-à-terre: Le patron gagne beaucoup d'argent si, et seulement si, il vend à beaucoup de clients. Le facteur prix est déterminant, même si d'autres éléments interviennent, comme la psychologie ( image de la marque dans l'esprit de l'acheteur), la composition (ingrédients ou matière utilisée: plastique, ou métal, ou etc...),les qualités physiques de l'objet , l'esthétique, les fonctions annexes, les qualités ergonomiques et le confort etc...
De très bons ouvriers peuvent fabriquer un objet mal conçu, qui ne se vendra pas pour cette raison et que les clients bouderont . Parallèlement de très bons vendeurs ne vendront que très difficilement un produit qui ne plait pas !
Si un commerçant finit par crever le plafond de 20 fois le SMIC, comment justifier le fait de bloquer son bénéfice personnel en raison d'un rapport de 1 à 20 ? Et qui hériterait de l'argent? Car les employés sont déjà intéressés. Un Etat qui bloquerait ainsi le bénéfice d'un commerçant friserait le totalitarisme !
Si le commerçant est en société, alors oui ,il peut bloquer son salaire dans une échelle de 1 à 20, mais c'est alors une hypocrisie car il touchera quand même les dividendes de sa société ce qui ne changera rien au montant gagné !

J'ai volontairement pris cet exemple d'un commerçant car même dans un groupe de production comme un constructeur automobile, la bonne marche dépend des clients et de leurs achats, le travail des ouvriers n'est pas la condition essentielle de la réussite. Ce qui compte c'est de vendre, On le constate avec par exemple Airbus, ou les chantiers navals de Saint Nazaire, on vend d'abord et on fabrique après. Les ouvriers ont beau être considérés comme parmi les meilleurs de la planète, dans les moments creux, les chantiers navals ont frôlé la disparition faute de clients !
Un dirigeant comme le PDG de Peugeot a toujours une partie de sa rémunération indexée sur les résultats, il ne perçoit pas qu'un salaire au sens strict du terme. Dans ce contexte il est bon de rappeler que le groupe Peugeot a vendu en 2015 2973000 véhicules dans le monde. Si le PDG était payé à 2 Euros par véhicule vendu il gagnerait 5,94 millions d'Euros, or il en gagne 5,2 millions!
Il faut remettre les choses dans leur contexte et dire que Peugeot qui a augmenté ses ventes de 1,2% en 2015 a réalisé 1,2 milliards d'Euros de bénéfice Net. Si vous divisez ce bénéfice net par le nombre de véhicules vous trouvez 4036 Euros de net par véhicule, pas mal non ?
Peugeot a décidé de donner une prime de 2000 Euros à chaque salarié, un bon encouragement quand même ! Rappel il y a 184107 salariés dans le groupe Peugeot (Monde) à 2000 Euros cela fait la coquette somme de 368,3 millions d'Euros. Sans cette prime, le bénéfice Net dépasserait 1,5 Milliards.
Le revenu du PDG est dérisoire face au bénéfice du groupe. Baisser ce revenu n'aurait pas d'impact sur l'entreprise sauf de faire partir les cadres et faire plaisir à quelques personnes avant le crash de l'entreprise.
Sauf grosse erreur de ma part, ce qui intéresse les salariés c'est de garantir leur emploi avant tout et de voir augmenter leur rémunération dans le temps si cela est possible. Dans ces conditions il faut chercher des clients et garantir que ces clients vont continuer à acheter la marque.
La solution me paraît évidente, reste à savoir si les syndicats vont pousser ce pion, et là j'en doute:4036 Euros par véhicule ce n'est pas rien et, pour la protection de l'emploi, la prudence voudrait que le prix public des modèles soit baissé en moyenne de 2000 Euros par véhicule en favorisant les petites et moyennes gammes. Inévitablement la clientèle affluerait et la marge plus faible serait compensée par des ventes en hausse (et globalement le bénéfice augmenterait ).
Je vous donne l'exemple de la 108 affichée12850 Euros. La prendriez-vous à 10500 Euros ?
Et celui de la 308 GT à 31150 Euros, vous laisseriez-vous tenter à 29850 Euros ?
Mais les syndicats préfèrent se battre sur des acquis, protéger leurs droits de façon rigide, au risque de tout perdre en mettant l'entreprise en difficulté par leurs grèves, surtout en période difficile...

La protection de l'emploi par une pression sur la direction dans le but de faire baisser les prix n'est pas dans leur ADN, mais ce sont pourtant bien les clients qui les font vivre ! Sans clients il n'y a ni ouvriers, ni patrons ! Vous y croyez vous à des syndicats qui feraient grève pour réclamer une baisse du prix des voitures ? Ce serait pourtant terriblement efficace, ils auraient l'opinion pour eux, donc en plus un fort soutien.
Mais j'oubliais, c'est vrai nous sommes en France !

Cela dit si toutes les entreprises françaises agissaient ainsi (jetez un coup d'oeil sur le cumul de tous les bénéfices des entreprises cotées en Bourse ), les prix chuteraient de façon significative ( avec ne serait-ce que 200 milliards utilisés pour les baisses de prix, sur les 400 Milliards estimés de bénéfices), un énorme coup de fouet pour la croissance, d'abord à l'exportation puis dans le pays grâce à un bond significatif du pouvoir d'achat de chaque citoyen.
Mais les acteurs économiques qui ont le sens de l'intérêt général ne sont pas légion et comme les élus ne poussent pas dans la bonne direction..... Il ne se passe rien/
I HAD A DREAM ! Pourtant on n'a jamais été si près de le réaliser sur le plan des possibilités, et en même temps si loin sur le plan des mentalités ….. !


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