Présidentielle? On entend de tout, de grands discours sur les choix politiques, les alliances, les clivages, les sondages... Mais personne ne pense au quotidien des gens, à leurs attentes très terre à terre, et je pronostique une élection très impactée par la réalité.... Suivez mon raisonnement ci dessous !
En France il y a environ 14 millions de retraités. La retraite moyenne est de l'ordre de 1500€ (montant brut) mais la retraite médiane chute à environ 1100€, c'est celle qui sépare en deux blocs le groupe des retraités (7 millions touchent plus de 1100€, et 7 millions moins). Plus grave, 3,5 millions perçoivent moins de 550€ par mois!
Le confinement et la crise économique sont passés par là et les médias ont signalé la forte hausse de la pauvreté dans le pays, donc l'explosion du nombre des bénéficiaires du RSA., ainsi que l'afflux considérable de nouvelles têtes aux restos du cœur.
Malgré les mesures officielles annoncées et mises en place, cela prouve qu'un nombre important de français sont passés à travers les dispositifs (cas non prévus, exclusions voulues ou accidentelles et...). Outre les actifs précarisés, il faut savoir que parmi les retraités à moins de 1100€ par mois, beaucoup doivent travailler pour pouvoir faire face et j'évalue leur nombre à environ 5 millions de personnes. Le gros trou dans la raquette des aides concerne précisément tous ceux ayant perdu leur emploi à temps partiel, en particulier les retraités qui n'ont droit à rien, même si leur employeur est frappé par une interdiction administrative d'accueillir du public, même si le particulier qui les emploie déclare que l'arrêt de leur travail est lié au risque sanitaire et à leur âge (garde d'enfants etc...). Même remarque pour les retraités qui travaillent en auto-entrepreneur dans les services, de façon discontinue, ou qui doivent maintenir leur petit commerce en fonctionnement épisodique tout en payant les frais courants plein pot, en espérant vendre leur commerce à un repreneur jeune.
La première erreur du gouvernement a été, pour faire des économies de bouts de chandelles, de refuser l'idée d'un forfait minimum pour tous et automatique, quitte à le compléter par des systèmes complémentaires. Au lieu de cela on a lié les aides à la baisse du CA , non sans exclure un tas de gens .
Mais la deuxième erreur relève de l'apparente ignorance par nos élites de ce qu'est le monde de l'entreprise. En effet une entreprise qui ne fonctionne pas perd des recettes, c'est évident, mais une chose est certaine elle doit nécessairement payer ses frais incompressibles. Comme les salaires étaient déjà garantis aux salariés par l'assurance chômage pour éviter les licenciements par les entreprises et faciliter la reprise le moment venu, on peut se demander pourquoi les autres frais n'ont pas été traités de la même façon.... Car le choix du critère de baisse du C.A. N'a strictement aucun lien avec les frais de l'entreprise. Des entreprises à C.A. Égal peuvent avoir des marges totalement différentes. Par exemple si vous faites de la revente d'objets peu volumineux et recherchés à 1000€ qui vous coûtent en fait 100€ pièce à l'achat, vous avez peu de frais de fonctionnement, un peu de stockage, peut-être une petite boutique, des frais d'envoi éventuellement et la marge est très confortable;
si vous fabriquez un objet technique (mécanique ou électronique), vous devez financer un lieu de production, des matières premières et un lieu de stockage, du personnel spécialisé, des machines coûteuses, de l'énergie etc... La marge s'en ressent et les frais peuvent très bien représenter 70% du C.A. voire plus, alors que le prix de vente est faible.
Par conséquent le critère des frais de fonctionnement était bien plus pertinent que la baisse de C.A.
On comprend au passage pourquoi certains regrettent le confinement: le système d'aide à partir de 50% de baisse du C.A. leur a permis de gagner bien plus qu'en restant ouvert normalement ( hors Covid), d'où le peu d'entrain à reprendre le travail avec une jauge limitée (et sans aide) ce qui peut signifier de perdre de l'argent.
Quant aux retraités, les discriminer et les mépriser à ce point n'est pas tolérable. S'ils travaillent c'est en raison d'une petite retraite. Alors décréter que de leur baisse éventuelle de recettes on doit déduire le montant de leur retraite n'a pas de sens, car ils ont besoin de 100% de ces recettes pour compléter leur retraite. De plus ils ne cherchent pas à travailler pour gagner beaucoup mais seulement pour survivre... Quelqu'un qui touche 500€de retraite et qui travaille pour avoir 500€ de plus par mois, est considéré comme n'ayant droit à rien parce que 500 de recette moins 500 de retraite = zéro. Préjugé, et de surcroît calcul aberrant car le retraité a besoin de ces 500€ de plus pour vivre. La réalité est donc qu'il perd 500€ et on devait donc l'assimiler aux jeunes actifs auxquels, dans le même cas, on donne une aide de 50% soit 250€. Finalement, travailler pour un retraité serait un luxe du moins à en croire nos technocrates qui pondent ces dispositifs idiots. J'imagine que le traitement est identique pour les retraités salariés à temps partiels, exclus également de tout système d'aide!
Parenthèse sur les marges
Pour information, à une certaine époque la cordonnerie était le métier le plus rentable de tous: remplacer le talon d'un escarpin nécessite 1 cm² de caoutchouc, un coup de ponçage/nettoyage, une pointe de colle sur chaque pièce (double encollage), un coup de marteau, découpe précise du caoutchouc au ciseau autour du talon, coup de ponçage de finition. Durée de l'opération moins de 30 secondes, prix des matériaux 0,05€ revente minimum 3€ (et je suis gentil). Bien entendu entre la pose de la colle et le coup de marteau il faut attendre 10 à15 minutes de séchage, mais pendant ce temps on prépare d'autres chaussures. Même remarque pour la pose de fers de protection d'une semelle ou d'un talon, sauf que là on fait tout tout de suite et c'est encore plus rapide ( 3 pointes à enfoncer par fer)... Bref, coefficient 60 au moins, C.A. possible de 3 x 120 soit 360€ de l'heure, pour 0,05 x 120 soit 6€ de produits utilisés et une marge brute de 354€de l'heure (moins TVA)... Ceci explique pourquoi les cordonneries traditionnelles ont disparu au profit de chaînes de réparation minute dans les grandes surfaces....Mais ces boutiques ne font que les choses les plus faciles et rentables, et le véritable métier de cordonnier a quasiment disparu. Plus personne ne sait coudre le cuir (réparation des cartables, des chaussures tout cuir, des sacs etc...) faire les travaux délicats qui eux prennent du temps, et pour les meilleurs artisans chausser sur mesure..... De nos jours, on prend on use et on jette au lieu de réparer (même pour une chose minime), c'est cela la consommation!
Pour comparer, un coiffeur qui facture la coupe homme avec shampooing à 20€ et effectue ce travail en 20 minutes, a un potentiel de 60€de C.A. À l'heure moins les frais (loyer, shampooing, serviettes, blouses, blanchissage, et les frais liés à la Covid 19)... Rien à voir en rentabilité avec la cordonnerie, d'autant que s'agissant de C.A. TTC, dans les deux cas il faut déduire la TVA de 20% reversée à l'Etat!
Mais revenons au sujet principal
Il est probable que les «oubliés» des aides vont se détourner des titulaires du pouvoir pour se tourner vers l'espoir d'un changement....... La droite a échoué dans l'amélioration de la vie quotidienne des français, la gauche a également échoué, nous venons de vivre l'échec du ni-droite ni-gauche. Inévitablement les laissés pour compte vont se tourner vers une nouvelle expérimentation en croyant naïvement que ce ne pourra pas être pire... Je dis naïvement car, c'est un fait, aucun politique ne se soucie vraiment du bien être au quotidien de ses concitoyens. Or si les grandes causes et les grandes idées peuvent mobiliser, la réalité des votes est davantage liée aux problèmes très concrets dont tous les politiques se moquent.
Les «oubliés» déjà cités représentent au moins 5 millions de personnes plus les nouveaux pauvres. Ces victimes non aidées vont friser selon moi les 8 millions de personnes (et je suis encore très gentil).
Or le corps électoral avoisine les 48 millions d'inscrits, et disons qu'environ 22% vont s'abstenir ce qui laisse espérer 37,5 millions de votants. Après déduction des bulletins blancs ou nuls ainsi que de ceux en faveur des «petits candidats», il devrait rester une masse de 30 millions de suffrages à répartir entre les principaux candidats. Mais 8 millions de votes représentent à peu de chose près le seuil de qualification au second tour. Ainsi donc, si tous les mécontents et oubliés votent dans le même camp, ils peuvent à eux seuls qualifier n'importe quel prétendant. Et soyez en certains, ils voteront car ils sont très motivés!
Oubliés et conduits vers la précarité, pénalisés par les hausses en série de l'énergie et de nombre de tarifs, les plus pauvres des français viennent maintenant d'apprendre que le compteur Linky, garanti gratuit par le gouvernement, allait devenir payant ( nul n'ignore cependant que l'état détient plus de 80% d'EDF et qu'ENEDIS est filiale d'EDF...Alors EDF et Etat c'est bonnet blanc et blanc bonnet!). Encore du pouvoir d'achat en moins et une raison supplémentaire de changer de tête pour diriger le pays. Car, même si la politique étrangère et générale est approuvée, le rejet par ce gouvernement de toute idée d'amélioration du quotidien des français, surtout s'agissant des mesures les plus terre à terre et sur lesquelles on ne débat jamais, va peser très lourd dans la balance, bien plus lourd que les débats sur la laïcité, l'islamisme et autres sujets favoris des politiques.
La victoire de M. Le Pen deviendra possible si les 8 millions basculent dans son camp. Cela dit, ce cas échéant et les politiques étant ce qu'ils sont, lorsque les français se rendront compte que strictement rien ne change dans leur quotidien ( et ils en sont à l'Euro près), il ne restera plus que la tradition révolutionnaire de notre pays pour partir sur de nouvelles bases. Il serait en effet vain de croire que nos élus actuels, tous partis confondus, pourraient s'entendre, supprimer leurs privilèges, et gouverner en donnant la priorité aux idées des citoyens de base et non aux leurs, ce que Macron avait annoncé et commencé à faire pendant la campagne de 2017 mais qu'il a immédiatement stoppé dès son élection. Cette promesse majeure non tenue pèsera aussi très lourd en 2022 !
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